JUSTICE ET PAIX : CELEBRATION DE LA 14ème JOURNEE DIOCESAINE

JUSTICE ET PAIX : CELEBRATION DE LA 14ème JOURNEE DIOCESAINE

Ce dimanche, le 9 septembre 2018 était une journée qui n’est pas comme les autres dans le doyenné du Buhumuza (Cankuzo) en paroisse de Muyaga où se célébrait la 14ème journée diocésaine de justice et paix. Cette célébration avait été précédée, Samedi le 8 septembre, par une veillée de prière. Dans cette veillée avait eu lieu la première séance de réconciliation des personnes originaires de la colline Mugenda. Ces personnes ont saisi l’occasion pour se dire la vérité sur ce qui s’est passé : la persécution de 1993 qui a poussé certains à l’exil. Ils ont ensuite saisi l’occasion pour se pardonner mutuellement.

Pendant la messe du jour, au moment de la célébration pénitentielle, on a médité sur les témoignages de réconciliation : le premier témoignage concernait le rôle du Colonel BUZOYA dans la protection de la population de Cankuzo. Après cela, six personnes de la colline Nyabisindu ont saisi l’occasion pour se dire publiquement la vérité sur le rôle joué par chacun pendant la crise de 1993. Une d’entre elles a même reconnu avoir tué le mari d’une victime et avoir amputé la main d’une autre. Toutes ces personnes y comprise celle qui a été amputée, se sont demandé pardon et se sont réconciliées. Et puis la messe a continué comme d’habitude. Il convient de souligner que les lectures choisies pour cette messe invitaient précisément à cette réconciliation. Ainsi, dans la première lecture tirée du livre de la Genèse (Gn 50, 5-20), le patriarche Joseph pardonne à ses frères qui l’avaient vendu en Egypte ; dans la deuxième, la première lettre de Saint Jean, (1Jn 1, 5 – 2, 2), on y trouve une invitation à reconnaitre ses péchés afin que ceux-ci puissent être pardonnés ; et dans l’Evangile selon Saint Matthieu, (Mt 18, 15-20), le Seigneur invite à la correction fraternelle tout en soulignant le rôle de la communauté dans la réconciliation.

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Dans son homélie, Son Excellence Monseigneur Blaise NZEYIMANA, évêque du Diocèse de Ruyigi qui présidait la messe, a poursuivi sur la même lancée en invitant les chrétiens au pardon et à la réconciliation et en précisant le but de la culture de la paix et de la réconciliation : celle-ci vise à la paix durable, à la vraie paix. En effet, des personnes peuvent vivre dans un semblant-de-paix alors qu’au fond d’eux-mêmes, ils recèlent des rancunes, des pensées mauvaises, des projets de meurtre.  Il faut donc bannir la rancune, l’hypocrisie, pour vivre dans la vraie paix. Il a ensuite affirmé que la communion avec le Seigneur ou l’alliance avec lui est l’unique source de la vraie paix. Comme cela est affirmé dans la bible, Dieu projetait depuis toujours de faire alliance avec son peuple ; cette alliance devrait être intériorisée comme le dit le prophète Ezéchiel et portée à la perfection dans la mort et la résurrection de Jésus-Christ grâce à son sang versé qui a lavé nos péchés. L’Ordinaire a invité le peuple chrétien à vivre dans l’amour ; en effet, la vie dans l’amour invite à faire disparaître de notre vie toute malfaisance et toute indifférence. En outre, il a invité le peuple de Dieu à vivre dans la vérité. Le pardon et la réconciliation véritable ne peuvent advenir sans la vérité, ne peuvent advenir quand on vie dans l’hypocrisie ! La culture de la vérité aide à renforcer la paix entre les hommes. Enfin, nous sommes appelés à éduquer nos enfants dans cette culture de la vérité, du pardon et de la réconciliation pour une véritable paix dans notre pays. 

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Vers la fin de la messe, après le moment de l’action de grâce, des discours de circonstance ont été prononcés. Le premier a été prononcé par Madame la représentante de la Commission Vérité et Réconciliation(CVR). Dans un premier temps, elle a précisé qu’elle est venue pour soutenir le Diocèse dans cet objectif de renfoncement de la justice et de la paix dans le Diocèse.  Elle a ainsi saisi l’occasion pour reconnaitre le travail déjà accompli dans la consolidation de la paix. Elle a en particulier apprécié le choix des textes liturgiques qui permettent de bien méditer sur le thème de la réconciliation. S’agissant du travail de la Commission Vérité et Réconciliation, on est maintenant – disait-elle – occupé à faire la synthèse du travail d’écoute réalisé dans tout le pays. Cela permettra de connaitre en particulier les personnes tuées mais aussi leurs bourreaux. Elle a également tenu à préciser que le travail réalisé par le Diocèse Ruyigi aidera considérablement la CVR.

Par après, on a entendu le discours du représentant de la Commission Episcopale Justice et Paix (CEJP). Pour lui, il était venu pour féliciter le Diocèse de RUYIGI pour cette pastorale de justice et paix qui aide les burundais à vivre en paix. Il a particulièrement félicité le Diocèse Ruyigi pour l’attention faite à la jeunesse pour l’amener à vivre la culture de la réconciliation. Il a également saisi l’occasion pour annoncer que la CEJP a mis sur pied un projet de trois ans (2017-2020) pour aider les burundais dans la démarche de la vérité et la réconciliation. Et en ce sens, la commission diocésaine justice et paix de Ruyigi vient de frayer le chemin.

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A suivi le discours du Gouverneur de la province de Cankuzo qui, dans un premier moment, a apprécié la pastorale de la commission diocésaine justice et paix car elle contribue énormément à la paix dans le diocèse et dans le pays. Selon le Gouverneur, la pastorale de la commission Justice et Paix aide à déraciner l’esprit divisionniste qui mine encore les cœurs des burundais.  A la fin de son intervention, le Gouverneur a demandé à l’Evêque de RUYIGI que cette technique de la commission justice et paix soit aussi apprise aux administratifs pour qu’ils puissent davantage contribuer eux aussi.

Enfin, l’Evêque de RUYIGI a été invité à prendre la parole, mais avant son intervention, il a d’abord passé la parole à S.E. Mgr Evariste NGOYAGOYE archevêque émérite de Bujumbura pour qu’il puisse saluer les chrétiens.  Dans son discours, il a remercié l’Evêque de Ruyigi d’avoir répondu à l’appel des Evêques du Burundi en construisant le sanctuaire du Sacré-Cœur de Jésus : ce qui avait été proposé lors de la célébration de l’année de la foi. Enfin dans la logique du pardon et de la réconciliation, il s’est engagé à travailler avec la commission justice et paix pour inculquer cet esprit aux jeunes qui lui ont été confiés dans le cadre de la pastorale des jeunes. Mgr l’Evêque de RUYIGI a finalement pris la parole en exprimant sa gratitude pour le travail réalisé dans la préparation de cette journée. Tout le monde, disait-il, a besoin du pardon, et c’est dans la mesure où nous en prenons conscience que nous pouvons pardonner aux autres. Par ailleurs, le pardon devrait être une culture, une pratique de tous les jours. Enfin, il a invité tout un chacun à prier pour cette pastorale, pour qu’elle porte beaucoup de fruits dans notre vie chrétienne : "on ne saurait être un bon chrétien si on n’est pas en communion avec Dieu et avec nos frères".
Après cela, c’était la remise aux autorités administratives et aux curés du livret où sont recensées les personnes emportées par la crise de 1993 à Cankuzo.  Après la bénédiction finale, la fête s’est clôturée par un moment d’échanges fraternels autour d’un verre.
Vive la justice qui engendre la paix !

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 Abbé Laurent KANYENTAMA